Éditorial de l’abbé Benoît Paul-Joseph dans la lettre aux Amis et Bienfaiteurs n°106 parue en mars 2021
Précieuse résistance

Chers amis et bienfaiteurs,

Bientôt quinze ans après le Motu proprio « Summorum Pontificum » par lequel Benoît XVI remettait à l’honneur la liturgie ancienne en la déclarant « expression extraordinaire de l’unique rit romain », ce ne sont pas moins de 200 lieux de culte, où, en France, la messe est désormais célébrée selon le missel romain de saint Pie V. Assurément, la lettre du pape a permis un développement sensible des communautés de fidèles attachées à la sacralité de cette forme liturgique, non seulement en facilitant les conditions de sa célébration, mais aussi en rendant justice à tous les catholiques, clercs et laïcs, qui avaient souffert de son abusive interdiction. Dans la lettre d’accompagnement du Motu proprio, Benoît XVI précisait en effet : « Ce missel n’a jamais été juridiquement abrogé, il est toujours resté autorisé ». Si donc, aujourd’hui, il est devenu relativement aisé – au moins au niveau du droit – d’assister à une messe selon la forme extraordinaire, il ne faut pas oublier les années durant lesquelles elle était, de fait, interdite et où des prêtres et des fidèles courageux se sont opposés à cette décision illicite. Ce sont eux, qui, dans la période postconciliaire, marquée par le désordre et l’anarchie, où les expérimentations liturgiques les plus scandaleuses allaient de pair avec les remises en cause théologiques les plus graves, au point que le pape Paul VI lui-même a parlé « d’auto-démolition de l’Église » et « d’apostasie pratique diffuse », ont résisté à ce raz-de-marée en s’arrimant solidement aux moyens de sanctification « antiques et vénérables » dont parle Benoît XVI dans le Motu proprio. Sans ces prêtres et ces fidèles légitimement déterminés, que l’on a qualifié dédaigneusement de « traditionalistes », parfois même d’ «intégristes », nul ne peut dire si l’autorité de l’Église aurait ensuite normalisé la célébration de la messe dite traditionnelle, ni permis la création d’instituts comme la Fraternité Saint-Pierre.

Non pour réveiller inutilement un ancien conflit, mais par piété filiale et pour ne pas tomber dans l’irénisme, il est bon que nous nous en rappelions.

Abbé Benoît Paul-Joseph
Supérieur du district de France